Du 17 mars au 23 avril 2016

HAKAPIK [akapik] n. m. – Du norvégien hakepigg, gourdin à crochet (hake, crochet; pigg, pointe). Instrument utilisé pour la chasse aux phoques.

« Sensible à l’actualité d’un sujet polémique auquel se mêlent des enjeux culturels, économiques, politiques et esthétiques, j’ai travaillé de 2012 à 2015 à un corpus photographique sur la chasse aux phoques aux Îles-de-la-Madeleine, à Terre-Neuve et au Nunavut.

Mon projet vise à la fois à documenter et à réfléchir sur la nature même de cette activité traditionnelle ancrée dans l’histoire des communautés maritimes et celles du Nord du Canada en particulier. Pour mener à bien ce projet, il était nécessaire de m’intégrer à une équipe de chasseurs et je devais d’abord les convaincre. Alors, j’ai suivi une formation donnée par Pêches et Océans Canada afin d’obtenir un permis de chasse aux phoques. Je devais devenir moi-même chasseur car aucun bateau n’embarque à son bord un passager inutile. Ainsi, sur une période de quatre ans, j’ai accompagné des escouades sur les glaces dans plus d’une vingtaine de voyages de chasse.

J’ai photographié cette série en noir et blanc. En faisant fi des couleurs, je cherche à neutraliser l’effet sensationnel que crée la vue du sang rouge sur la neige blanche. Je mise plutôt sur la représentation du geste et de la valeur symbolique du rituel afin de souligner la noblesse d’une activité coutumière fortement inscrite dans une tradition.

Ainsi, j’explore un processus de mise à distance psychologique et esthétique où le principe de décoloration offre au regard l’occasion de s’attarder davantage sur la construction de l’image, sur ses lignes, ses contrastes et sa lumière. Ainsi s’arriment la sensibilité du sujet, la force de la composition et la distance du traitement noir et blanc.

En plus de la présentation du corpus sous la forme d’une exposition, la publication d’un livre m’apparait essentielle pour assurer la pérennité, la transmission d’un savoir et d’une pratique tant pour les générations actuelles que pour les générations futures. »

Y.M.


Yoanis Menge est né en 1981. Il vit avec sa famille aux Îles-de-la-Madeleine où il travaille. De double nationalité, suisse et canadienne, il a étudié la photographie au Cégep de Matane (Québec, Canada). En 2002, il réalise son premier reportage sur la prostitution au Salvador. Par la suite, il approfondit sa formation à l’agence Magnum Photos (Paris) pendant quatre ans comme assistant des photographes Josef Koudelka et Bruno Barbey.

L’artiste a reçu en 2015 le Prix du CALQ – Oeuvre de l’année aux Îles-de-la-Madeleine pour son installation photographique « Rouge sur blanc » diffusée par le centre d’artistes AdMare.

La pratique artistique de Yoanis Menge est ancrée dans une approche documentaire. Ses séries d’images abordent différents aspects du paysage géographique et social des lieux qu’il visite ou qu’il habite. Elles traitent de problématiques locales qui touchent des communautés spécifiques comme « Le déclin de la pêche à la morue » (Terre-Neuve, Canada), « Transgenres » (Paris, France), « Mali pays-visages » (Mali), « Populations déplacées » avec Médecins sans frontières (Nord-Kivu, République démocratique du Congo), « Mémoires insulaires » (Îles-de-la-Madeleine, Québec, Canada), « 132 » (Gesgapegiag, Québec, Canada).

Au Québec, l’artiste a diffusé son travail aux Rencontres internationales de la photographie en Gaspésie, au Musée de la mer, aux centres d’artistes AdMare, ESPACE F et Séquence ; en France : à la Galerie P8, la Galerie La Générale Nord-Est, aux Festival Porte-Voix et Festival Itinérance, à la Biennale internationale de la photographie de Nancy.

Yoanis Menge est membre de KAHEM, collectif de photographes québécois indépendant. Privilégiant l’échange et la réflexion sur les pratiques documentaires, les membres du groupe explorent diverses orientations tant classiques que contemporaines et mettent de l’avant le regard d’auteur.

Image : Yoanis Menge, Tableau de chasse, Hakapik, 2012-2015

La Presse : « Réhabiliter la chasse au phoque » par Éric Clément

Le Devoir : « La chasse aux phoques et ses quatre vérités » par Jérôme Delgado

« Yoanis Menge, un photographe à la mer » entrevue avec Jean-François Nadeau

CISM / Déjeuner sur l’herbeÉmission sous le thème de la tradition

L’Oeil de la photographieMontréal : Yoanis Menge, Hakapik par Sophie Bertrand

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From March 17 to April 23, 2016

HAKAPIK [akapik] noun – From the Norwegian hakepigg, a club with a hook (hake, hook; pigg, point). A tool used in seal hunting.

“From 2012 to 2015, sensitive to a controversial subject, with its mix of cultural, economic, political, and aesthetic issues, I worked on a series of photographs dealing with the seal hunt, on the Magdalen Islands, in Newfoundland, and in Nunavut.

My project aims to document and to reflect on the very nature of a traditional activity rooted in the history of maritime communities, of northern Canada in particular. I had to join a team of hunters to carry out this project—and I first had to convince them. So I underwent training at Fisheries and Oceans Canada to obtain a seal-hunting license. I had to become a hunter myself because no boat would take a nonfunctional passenger on board. Thus, over the course of four years, I accompanied hunting parties on the ice in more than twenty expeditions.

I photographed this series in black and white. By ignoring color, I’m attempting to neutralize the sensationalism created by the view of red blood on white snow. I focus instead on the representation of the gesture and of the symbolism of the ritual, in order to emphasize the nobility of an activity that is deeply inscribed in a tradition.

I thus explore a psychological and aesthetic process of distantiation, in which the discoloration gives the viewer the opportunity to dwell on the construction of the image, on its lines, contrasts, and light.

In addition to the presentation of the body of work in the form of an exhibition, I believe the publication of a book is essential to ensure the continuity and transmission of this particular knowledge and practice, both for current and for future generations.”

Yoanis Menge


 

Yoanis Menge was born in 1981. He lives with his family on the Magdalen Islands, where he works. Of dual Swiss and Canadian nationality, he studied photography at the Cégep de Matane (Quebec, Canada). In 2002 he produced his first documentary about prostitution in El Salvador. Thereafter, he studied at the Magnum Photos agency (Paris) for four years as assistant to photographers Josef Koudelka and Bruno Barbey. In 2015, Menge received the CALQ award for Work of the Year on the Magdalen Islands for his photographic installation Rouge sur blanc (“red on white”) shown at the AdMare artist centre.

Yoanis Menge’s art practice is steeped in a documentary approach. His images series address different aspects of the geographical and social landscape of the places he visits or in which he lives. They deal with local issues affecting specific communities, as Le déclin de la pêche à la morue (Newfoundland, Canada), Transgenres (Paris, France), Mali pays-visages (Mali), Populations déplacées, with Doctors without borders (North Kivu, Democratic Republic of Congo), Mémoires insulaires (Magdalen Islands, Quebec, Canada), 132 (Gesgapegiag, Quebec, Canada).

Yoanis Menge is a member of KAHEM, a group of independent photographers from Quebec.

La Presse: « Réhabiliter la chasse au phoque » by Éric Clément

Le Devoir: « La chasse aux phoques et ses quatre vérités » by Jérôme Delgado

« Yoanis Menge, un photographe à la mer » interview with Jean-François Nadeau

CISM / Déjeuner sur l’herbe : On the theme of tradition

L’Oeil de la photographie : Montréal : Yoanis Menge, Hakapik by Sophie Bertrand